Pierre BRASSINE

1786-1865

 

 

Pierre Brassine, est renseigné aux registres paroissiaux de Saint-Clément à Watermael-Boitsfort (commune de Bruxelles ; département de la Dyle) comme né et baptisé le 27 mars 1786 ; il est l'aîné de neuf enfants (6 garçons et 3 filles).

 

La conscription pour le service dans les armées de la République avait été promulgée par la loi du 19 fructidor an IV (5 septembre 1796) et son application aux départements belges fut rendue obligatoire à partir de l’an VIII (1800).

 

Etant donné le besoin d’hommes pour les guerres que devait mener le Consulat, Pierre Brassine fut appelé anticipativement à faire partie de la levée de 1806. Il préféra signer un engagement volontaire de huit ans, ce qui, avec les connaissances générales appréciables et l’instruction acquise malgré la période agitée dans laquelle s’écoula sa première jeunesse (Révolution brabançonne, Révolution française, Guerres de la République et de l’Empire français), lui assurait l’accession aux grades subalternes. Le 22 octobre 1806, il entre au service de la France, en qualité de volontaire, comme simple soldat au 112e.régiment d’infanterie de ligne de l’empire. ([1])

Le registre de contrôle le décrit comme suit :

 

Taille : 1,73 m

Yeux :              gris

Cheveux :            châtains

Visage :            plein

Bouche :            moyenne

Menton :            rond

Nez :                petit

 

Pierre Brassine rejoint, à Grenoble, son régiment qui y séjournait depuis le 1 novembre. Dès le 17 novembre, le 2e bataillon, dont fait partie Pierre Brassine, traverse le mont Cenis et arrive vers la fin du mois à Turin, puis Alexandrie (Piémont), où la division est tenue en réserve. Il est nommé caporal le 1 janvier 1807.

 

En février 1808, la 112e demi-brigade, commandée par le colonel Penne, est dirigée vers la Toscane. La brigade, jointe à l’armée commandée par le Prince Eugène de Beauharnais, était chargée de maintenir l’ordre dans cette région d’Italie agitée de mouvements de révolte dus aux contributions exigées par les autorités françaises et, surtout, à l’application rigoureuse des lois sur la conscription.

 

 

Au printemps 1809, l’Autriche entre en campagne et la 112e demi-brigade est dirigée vers le Tyrol. Attaquée en cours de route, à Trente,  par les autrichiens du marquis de Chasteleer ( un belge !), les fantassins français parviennent à repousser l’assaut non sans de nombreux blessés parmi lesquels Pierre Brassine, grièvement atteint le 11 avril 1809 à la main gauche et qui y perdra le médius. Mais la 112e demi-brigade peut accrocher à son drapeau la Légion d’Honneur.

 

L’armée autrichienne, vaincue dans le sud de l’Allemagne, se retire sur Wagram. Au cours de la bataille qui s’y déroula, les 5 et 6 juillet, Pierre Brassine reçoit un coup feu au bras gauche. En récompense de sa bravoure, il est nommé Sergent-major, le 10 juillet 1808.

 

Son régiment tient ensuite garnison en Italie, à Sienne et à Florence.

 

L’année de la campagne de Russie, Pierre Brassine est nommé  Adjudant-sous-officier le 11 mars 1812. En octobre, la 112e demi-brigade est à Berlin, qui est pris puis abandonné.

 

Le 2 mai 1813, son régiment participe à la bataille de Lutzen, puis, sur la route de la retraite, à celle de Bautzen où un bataillon de la 112e demi-brigade est entièrement décimé. On retrouve Pierre Brassine, en octobre, à la bataille de Leipzig puis, en novembre, au cours du repli vers la Vénétie, il prend part au blocus de Palma-Nova où, le 13 avril 1814, il est blessé à nouveau par un biscayen dans la jambe gauche et la cuisse droite et fut même laissé pour mort. 

 

De recul en recul, s’ouvre la campagne de France et l’abdication de Napoléon Ier. Le 112e est dissous en mai 1814 et Pierre Brassine rentre en Belgique.

 

Au retour de Napoléon de l'île d'Elbe, Pierre Brassine reprit du service en qualité de sous-lieutenant et fut présent à la bataille de Waterloo.

 

 

C'est là que, gisant blessé au genou par un éclat de mitraille sur le champ de bataille, il ramassa un aigle de bronze garnissant la voiture de campagne de l'Empereur ([2]), objet qu'il avait vu tomber lorsque Napoléon quittait les lieux pour Paris.

 

 

Son fils Jacques-Joseph raconte cet épisode comme suit :

 

« Etant blessé, Pierre Brassine, fut transporté à l’arrière du champ de bataille et se trouvait ainsi à proximité du Q.G.de l’Empereur lorsque celui-ci, convaincu de la défaite, s’éloignait pour regagner Paris.

Au moment où la voiture démarra, il vit tomber de la portière un objet brillant. Bien que très affaibli par la perte de sang provenant de sa blessure, il s’approcha en rampant, en s’aidant des mains et genoux, jusqu’à l’endroit où était tombé l’objet et ramassa un petit sujet représentant un aigle de bronze. Il plaça cet objet sur sa poitrine, sous sa tunique, en souvenir de son Empereur, et s’évanouit épuisé. Revenu à lui dans un hôpital où il avait été transporté, il fut assez heureux de retrouver sa précieuse relique. »

 

Après les événements de 1815, Pierre Brassine fut licencié du service le 31 décembre 1815. L’inactivité lui pesait cependant et, le 11 octobre 1816, Pierre Brassine se mit au service des Pays-Bas jusqu’à  la révolution belge de 1830. Il participa à la campagne des dix-huit jours, obtint le brevet de lieutenant-adjudant-major et fut promu au grade de capitaine de 2e.classe, le 6 octobre 1831. Il termina sa carrière militaire comme commandant de la place de Namur en 1843.

 

 

 

Sa bravoure, qui se fit remarquer dans plusieurs combats mémorables, lui valut d’être admis, par décret impérial du 12 novembre 1853 ([3]),  dans la Légion d’Honneur avec le grade de chevalier.

 

Attributaire de la pension de légataire de l’Empereur, il reçoit de Napoléon III, le 12 août 1857, la médaille de Ste.Hélène.

 

Père d’une nombreuse famille,  Pierre Brassine eut la satisfaction de compter ses six fils sous les drapeaux de sa patrie. Son fils Jacques-Joseph devint Lieutenant-Général, aide de camp du roi Léopold II et Ministre de la Guerre.

 

Pierre Brassine mourut à Molenbeek-St.Jean (Bruxelles), le 24 février 1865

 

 



NOTES

[1] La 112e demi-brigade, régiment d’infanterie de ligne de l’empire, fut créée à Bruxelles par le général Caulaincourt, aide de camp de Bonaparte, premier consul. Un arrêté du 6 avril 1803 consacre sa constitution. Le 112e était principalement formé de conscrits et de volontaires, tant flamands que wallons ou bruxellois, recrutés dans les neuf départements établis par le régime français. Les campagnes suivantes figurent au palmarès de ce régiment : Sur les côtes de l’Océan (1804-1805) ; A l’armée de réserve d’Italie (1807) ; Aux armées d’Italie et d’Espagne (1808-1809) ; Aux armées d’Italie et de Catalogne (1810-1811) ; Aux armées d’Italie (1812) ; Au 11e corps de la Grande Armée (1813) ; Aux armées de Lyon et d’Italie (1814). Ses aigles portent les mentions suivantes : RAAB 1809, WAGRAM 1809, LUTZEN 1813, BAUTZEN 1813

 

[2] C’est cette voiture qui accueillit le vainqueur le lendemain de la bataille de Ligny, le 17 juin, pour se diriger vers les Quatre-Bras. Le soir du 17, elle fut garée dans la cour de la ferme du Caillou. La berline de Napoléon fut capturée par les Prussiens devant Genappe et expédiée en Angleterre par von Keller. Elle fut longtemps exposée à l’Egyptian Hall, à Piccadilly, par le sieur Bullock auquel elle avait été revendue, puis au musée Tussaud. En 1925, l’incendie du musée Tussaud détruisit complètement la berline de Waterloo. (Théo Fleischman, Histoire de la ferme du Caillou, Quartier général de Napoléon, Ed.de la Sté.belge d’études napoléoniennes, Bruxelles, 1965, pp.74-76.)

 

L’aigle de bronze fait toujours partie des collections de famille.

   

[3] Le décret impérial portait : « Une médaille commémorative sera donnée à tous les militaires français et étrangers des armées de terre et de mer qui ont combattu sous nos drapeaux de 1792 à 1815 ». Pierre Brassine fut autorisé, par arrêté royal paru au Moniteur Belge du 23 janvier 1858, à porter cet insigne d’ordre étranger « sans pouvoir la détacher du ruban ».

 

SOURCES et BIBLIOGRAPHIE

Etats de service de Pierre Brassine, Alost, le 8 novembre 1831, papiers de famille

 

Archives Générales du Royaume -  Dossier « officiers-carrière »

 

Moniteur belge du samedi 23 janvier 1858

 

Nécrologie, in La Voix du Peuple, 1 mars 1865

 

Faire part de décès de Pierre Brassine, Bibliothèque Royale de Belgique, Mss.71176, vol.13

 

Société d’Etudes Historiques & Folkloriques de Waterloo, Braine l’Alleud & environs, ASBL

 

Les conscrits de 1813, in La Belgique militaire, s .l., 1900, pp.1127 et suiv.

 

Major E.Cruyplants, Histoire d’un corps belge au service de la République et de l’Empire : la 112e demi-brigade, Bruxelles, 1902

 

Théo Fleischman, Histoire de la ferme du Caillou, Quartier général de Napoléon, Ed.de la Sté.belge d’études napoléoniennes, Bruxelles, 1965, pp.74-76.

 

Lieutenant-Général Albert Brassine, Biographie de Pierre Brassine, papiers de famille

 

Jean de Launois, Généalogie de la famille Brassine, en Brabant, in L’Intermédiaire des Généalogistes, n° 261 et 262, Bruxelles, 1989